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L'espace d'Atoum

« J'étais solitaire dans le Nouou et inerte. Je ne trouvais pas d'endroit où je puisse me tenir debout, je ne trouvais pas de lieu où je puisse m'asseoir. La ville d'Héliopolis où je devais résider n'était pas encore fondée, le trône sur lequel je devais m'asseoir n'était pas encore formé...."

Le seul usage non conforme du bâtiment aux règles d’urbanisme en vigueur : Illégalité d'un permis de construire ?

Gardien de l’intérêt général et garant du bon fonctionnement l’administration, le juge administratif ne paraissait pas destiné à s’affirmer comme un protecteur des droits fondamentaux. Le droit administratif, « droit de privilège », a en effet d’abord été conçu pour soumettre l’administration à la loi, mais aussi pour préserver ses prérogatives et assurer l’efficacité de son action. Le Conseil d’Etat a cependant vite perçu la nécessité de concilier les exigences de l’intérêt général et les impératifs de l’action administrative avec celles de la protection des droits et des libertés des personnes

http://www.conseil-etat.fr/Actualites/Discours-Interventions/Le-juge-administratif-et-les-droits-fondamentaux-Premiers-entretiens-du-contentieux

Conseil d'Etat 18 juillet 2018 n° 410465

Article L421-6 du code de l'urbanisme : "Le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé que si les travaux projetés sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires relatives à l'utilisation des sols, à l'implantation, la destination, la nature, l'architecture, les dimensions, l'assainissement des constructions et à l'aménagement de leurs abords et s'ils ne sont pas incompatibles avec une déclaration d'utilité publique.

Le permis de démolir peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les travaux envisagés sont de nature à compromettre la protection ou la mise en valeur du patrimoine bâti ou non bâti, du patrimoine archéologique, des quartiers, des monuments et des sites".

Par arrêté du 4 mai 2009, la mairie de C délivre un permis de construire à un groupement agricole d'exploitation en commun pour l'édification d'un bâtiment agricole à usage de stockage de matériel agricole.

Le 28 février 2013, après un retrait, un jugement administratif annule l'acte.

Le 26 avril 2010, les travaux sont achevés. Le pétitionnaire sollicite la régularisation de la construction.

[Il convient de rappeler que l'article L521-1 du code de justice administrative permet au requérant qui agit en annulation de l'acte d'en demander sa suspension auprès du juge des référés. Le recours exercé contre un permis de construire (qu’il soit gracieux ou contentieux) ne suspend pas l’autorisation d’urbanisme accordée]

A la suite de refus et d'un retrait, par arrêt du 10 janvier 2014, le maire de la commune fait droit à la demande en délivrant le permis de construire au groupement agricole d’exploitation en commun. Le 21 janvier 2014, il sera suivi d'un permis de construire modificatif.

Les voisins contestent ces deux arrêtés devant le tribunal administratif de B sur la base de la non conformité du bâtiment aux règles d’urbanisme. La zone agricole dans laquelle se situe le bâtiment litigieux interdit toutes occupations ou utilisations du sol autres que celles visées à son article A2 : des “constructions à usage agricole directement liées et strictement nécessaires à l’exploitation agricole”.

Par jugement du 10 décembre 2015, leur requête est rejetée. Ils interjettent appel.

Par un arrêt du 9 mars 2017, la cour d'appel de N fait droit à la demande pour annuler le jugement et les actes en cause pour méconnaissance des dispositions d'ordre urbanistique :

"la méconnaissance de ces dispositions, en se fondant sur la circonstance qu'il ressortait des pièces du dossier, notamment de constats d'huissier réalisés en 2011 et 2016, que le bâtiment en cause n'avait pas un usage exclusivement agricole mais abritait essentiellement des machines et des outils dépourvus de lien avec l'activité agricole".

Les pétitionnaires forment un pourvoi. La question posée :

  • L'illégalité de l'arrêt octroyant un permis de construire peut-il ressortir uniquement sur la non conformité de la construction aux règles d'urbanisme en vigueur ?

Préalablement à sa décision, le Conseil d'Etat précise :

  • "Un permis de construire n'a d'autre objet que d'autoriser la construction d'immeubles conformes aux plans et indications fournis par le pétitionnaire. La circonstance que ces plans et indications pourraient ne pas être respectés ou que ces immeubles risqueraient d'être ultérieurement transformés ou affectés à un usage non conforme aux documents et aux règles générales d'urbanisme n'est pas, par elle-même, sauf le cas d'éléments établissant l'existence d'une fraude à la date de la délivrance du permis, de nature à affecter la légalité de celui-ci".

La Haute juridiction administrative censure l'arrêt de la cour d'appel au motif qu'en

  • "se fondant ainsi sur des circonstances liées à l'usage, passé et présent, du bâtiment en cause, et non sur les indications qui figuraient dans la demande présentée par M. B...à l'administration", le cour d'appel n'a pas "caractérisé l'existence d'une fraude à la date des arrêtés attaqués". Elle a commis une erreur de droit.

Cette décision est l'occasion de rappeler la condition d'intérêt à agir du requérant dans le cadre d'un contentieux administratif lié à un permis de construire.

M. et Mme A… et Nicole E… ont demandé au tribunal administratif de Besançon d’annuler pour excès de pouvoir l’arrêté du 10 janvier 2014 par lequel le maire de la commune de Chisséria (Jura) a délivré à M. C… B… le permis de construire un hangar à usage agricole, ainsi qu’un permis de construire modificatif du 21 janvier 2014 portant sur le même bâtiment. Par un jugement n° 1400339 du 10 décembre 2015, le tribunal administratif de Besançon a rejeté leur demande.

Par un arrêt n° 16NC00139 du 9 mars 2017, la cour administrative d’appel de Nancy, saisie d’un appel formé par M. et Mme E…, a annulé le jugement du tribunal administratif de Besançon du 10 décembre 2015, ainsi que les arrêtés des 10 et 21 janvier 2014.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 11 mai et 11 août 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, M. et Mme C… et Sylvie B… demandent au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de M. et Mme E… la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.



CE, 1re ch., 18 juill. 2018, n° 410465. Lire en ligne : https://www.doctrine.fr/d/CE/2018/CEW:FR:CECHS:2018:410465.20180718
M. et Mme A… et Nicole E… ont demandé au tribunal administratif de Besançon d’annuler pour excès de pouvoir l’arrêté du 10 janvier 2014 par lequel le maire de la commune de Chisséria (Jura) a délivré à M. C… B… le permis de construire un hangar à usage agricole, ainsi qu’un permis de construire modificatif du 21 janvier 2014 portant sur le même bâtiment. Par un jugement n° 1400339 du 10 décembre 2015, le tribunal administratif de Besançon a rejeté leur demande.

Par un arrêt n° 16NC00139 du 9 mars 2017, la cour administrative d’appel de Nancy, saisie d’un appel formé par M. et Mme E…, a annulé le jugement du tribunal administratif de Besançon du 10 décembre 2015, ainsi que les arrêtés des 10 et 21 janvier 2014.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 11 mai et 11 août 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, M. et Mme C… et Sylvie B… demandent au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de M. et Mme E… la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.



CE, 1re ch., 18 juill. 2018, n° 410465. Lire en ligne : https://www.doctrine.fr/d/CE/2018/CEW:FR:CECHS:2018:410465.20180718
M. et Mme A… et Nicole E… ont demandé au tribunal administratif de Besançon d’annuler pour excès de pouvoir l’arrêté du 10 janvier 2014 par lequel le maire de la commune de Chisséria (Jura) a délivré à M. C… B… le permis de construire un hangar à usage agricole, ainsi qu’un permis de construire modificatif du 21 janvier 2014 portant sur le même bâtiment. Par un jugement n° 1400339 du 10 décembre 2015, le tribunal administratif de Besançon a rejeté leur demande.

Par un arrêt n° 16NC00139 du 9 mars 2017, la cour administrative d’appel de Nancy, saisie d’un appel formé par M. et Mme E…, a annulé le jugement du tribunal administratif de Besançon du 10 décembre 2015, ainsi que les arrêtés des 10 et 21 janvier 2014.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 11 mai et 11 août 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, M. et Mme C… et Sylvie B… demandent au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de M. et Mme E… la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.



CE, 1re ch., 18 juill. 2018, n° 410465. Lire en ligne : https://www.doctrine.fr/d/CE/2018/CEW:FR:CECHS:2018:410465.20180718

I- L'intérêt à agir

Article L600-1-2 de l'urbanisme "Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation".

Tout d'abord relevons la jurisprudence Préfet de l’Eure qui prévoit que l’administration ne peut demander au juge ce qu’elle est en droit de mettre en œuvre par elle-même, en vertu du privilège du préalable (CE, 30 mai 1913, Préfet de l’Eure, requête numéro 49241). Il en résulte que l’administration n’aura pas, en principe, la qualité de requérante en première instance. Pour autant un litige peut opposer deux personnes publiques :

  • "Considérant que pour réclamer, (…), le remboursement des frais d’assistance avancés par le département de l’Eure, à raison de l’hospitalisation de l’enfant Breton, il appartenait eu préfet de délivrer un état de recouvrement contre ladite commune, sauf à celle-ci à faire opposition au titre émis contre elle devant le Conseil de préfecture (…); que, par suite, le préfet du département de l’Eure n’est pas recevable à demander directement au Conseil ‘Etat de déterminer la commune où l’enfant Breton s son domicile de secours".

Ensuite rappelons l'adage « Nul ne plaide par procureur ». L’action tendant à l’annulation ou à la réformation d’un acte doit émaner d’une personne ayant un intérêt pour agir.

Il appartient donc à tout requérant qui saisit le juge administratif d'une recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, comme en l'espèce, de préciser, d'étayer l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir.

Le juge de l'excès de pouvoir se prononcera sur la recevabilité de la requête au vu des éléments versés au dossier par les parties.

L'intérêt doit être en rapport direct avec l'acte attaqué : CE Sect., 28 mai 1971, Damasio

L'intérêt doit être réel :

L'intérêt doit être certain :

L'intérêt à agir peut-il être éventuel ou futur ?

CE, sect., 14 févr. 1958, n° 7715, Abisset

L'intérêt à agir peut-il être esthétique ou visuel ?

La décision du Conseil d'Etat en date du 22 mai 2012 précise que ce critère est insuffisant :

  • "Une commune qui se borne à faire état de l'atteinte qu'un projet, faisant l'objet d'un permis de construire délivré par la commune limitrophe, porte à l'environnement visuel de ses habitants, sans se prévaloir d'une incidence sur sa propre situation ou sur les intérêts dont elle a la charge, ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation de ce permis de construire" n° 326367.

La décision du Conseil d'Etat en date du 16 mai 2018 porte un coup au critère de visibilité tout en s'inscrivant au mouvement de restriction des recours contre les autorisations d'urbanisme initié par l'ordonnance n° 2013-638 du 18 juin 2013 relative au contentieux de l'urbanisme :

  • "La propriété des requérants est distante de 2,5 kilomètres des cinq éoliennes prévues dans la demande de permis dont la hauteur totale sera de 116 mètres. Même si, selon l'étude d'impact, le parc éolien sera visible du deuxième étage de l'édifice propriété des requérants, ces derniers ne justifient pas, au regard tant de la distance qui sépare le château du site retenu pour l'implantation du projet éolien que de la configuration des lieux, d'un intérêt leur donnant qualité pour agir" n° 408950.

Bien que cette approche ait été déjà retenue par une décision du Conseil d'Etat en date du 3 juin 2009 :

  • "Une commune qui se borne à faire état de l'atteinte qu'un projet, faisant l'objet d'un permis de construire délivré par la commune limitrophe, porte à l'environnement visuel de ses habitants, sans se prévaloir d'une incidence sur sa propre situation ou sur les intérêts dont elle a la charge, ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation de ce permis de construire" n° 305131.

II- L'existence d'un grief

Conseil d'Etat 10 juin 2015 n° 386121 :

  • "Considérant que les circonstances, invoquées par les requérants, que leurs habitations respectives soient situées à environ 700 mètres de la station en projet et que celle-ci puisse être visible depuis ces habitations ne suffisent pas, par elles-mêmes, à faire regarder sa construction comme de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance des biens des requérants".

Toutefois :

  • "ceux-ci font également valoir qu'ils seront nécessairement exposés, du fait du projet qu'ils contestent, à des nuisances sonores, en se prévalant des nuisances qu'ils subissent en raison de l'existence d'une autre station de conversion implantée à 1,6 km de leurs habitations respectives".

Bien que le bénéficiaire de l'autorisation de construire soulève une fin de non-recevoir tirer de l'affirmation que "le recours à un type de construction et à une technologie différents permettra d'éviter la survenance de telles nuisances", le Conseil d'Etat confirme que

  • "la construction de la station de conversion électrique autorisée par la décision du préfet P du 14 août 2014 doit, en l'état de l'instruction, être regardée comme de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance des maisons d'habitation des requérants".

La décision 18 juillet 2018 se situe dans le droit chemin des arrêts rendus en 2016 :

CE 14 avril 2016 "Considérant qu'en jugeant que M. C...ne justifiait pas d'un intérêt à agir contre le permis de construire attaqué, alors qu'il invoquait dans sa demande au tribunal être occupant d'un bien immobilier situé à proximité immédiate de la parcelle d'assiette du projet, au numéro 6 de la même voie, et faisait valoir qu'il subirait nécessairement les conséquences de ce projet, s'agissant de sa vue et de son cadre de vie, ainsi que les troubles occasionnés par les travaux dans la jouissance paisible de son bien, en ayant d'ailleurs joint à sa requête le recours gracieux adressé au maire de Marseille, lequel mentionnait notamment une hauteur de l'immeuble projeté supérieure à dix mètres et la perspective de difficultés de circulation importantes, le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Marseille a inexactement qualifié les faits de l'espèce" n° 389798 confirmée le 20 juin 2016 n° 486932).

Les voisins doivent faire état d’éléments relatifs à la nature, à l’importance ou à la localisation du projet.

Rappelons que l'article du code de justice administrative :

R600-1 oblige le requérant "En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre d'un certificat d'urbanisme, ou d'une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code" à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation.

 

R611-7-1 prévoit la cristallisation des moyens possibilité. Le juge peut fixer, sans clore l'instruction et par voie d'ordonnance, une date au-delà de laquelle des moyens nouveaux ne pourront plus être invoqué.

 

Rédigé le 11 mars 2011 (Voir lien ci-dessus)

  • Origine du REP 

L'arrêt Dame Lamotte du Conseil d'État le 17 février 1950 a considéré qu'il existe en droit administratif français un principe général du droit en vertu duquel toute décision administrative peut faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir, peu importe qu'il y ait ou non un texte qui le prévoit.

Exception

Selon l’article R 741-12 du Code de justice administrative : "Le juge peut infliger à l’auteur d’une requête qu’il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 3000 euros".

Est abusive, pour le juge administratif, la requête qui instrumentalise le prétoire, peu important les fins poursuivies.

Conseil d'Etat, du 3 novembre 2004, 273369 : "Considérant que sous couvert d'une prétendue demande d'interprétation de l'ordonnance du juge des référés du Conseil d'Etat du 18 octobre 2004, M. X a mis en cause dans des termes diffamatoires et qui en conséquence n'ont pas été repris dans l'analyse de sa requête, l'indépendance du signataire de cette ordonnance ; que la présente requête revêt un caractère abusif ; qu'il y a lieu pour ce motif d'infliger à son auteur une amende d'un montant équivalent en francs CFP à la somme de 1 500 euros".

Conseil d'État, , 24/04/2006, 292742 : "Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures " et qu'aux termes de l'article L. 522-3 du même code : " Lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée, le juge des référés peut la rejeter par une ordonnance motivée " ;

Considérant que la présente requête, laquelle ne répond manifestement à aucune des conditions posées par l'article L. 521-2 du code de justice administrative, n'est qu'une illustration du comportement de M.A..., qui se distrait à encombrer le Conseil d'Etat de requêtes manifestement infondées ou irrecevables et l'a, à cet effet, saisi, en vain, d'au moins 298 requêtes depuis le mois d'août 1998, sans d'ailleurs que les multiples amendes dont ont été assorties les décisions rendues sur ces requêtes abusives aient freiné cette quérulence ; que dans ces conditions, la requête de M. A...doit être regardée comme tendant uniquement à tester les limites de la patience des magistrats ; qu'un tel objet n'étant pas de nature à justifier la saisine d'une juridiction, cette requête, y compris ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doit être rejetée ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative : " Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 3000 euros " ; que la présente requête revêt un caractère abusif ; qu'il convient, en conséquence, de condamner M. A...à verser au Trésor public une amende s'élevant à la contrepartie en monnaie locale de la somme de 3 000 euros".

  •  Consécration comme principe général du droit

CJCE, n° C-222/84, Arrêt de la Cour, Marguerite Johnston 

« Le principe d'un contrôle juridictionnel effectif consacre par l'article 6 de la directive 76/207 , Principe qui se trouve a la base des traditions constitutionnelles communes aux Etats membres et qu'ont consacre les articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, s'oppose a ce qu'un effet de preuve irréfragable, excluant tout pouvoir de contrôle du juge, soit reconnu a un certificat d'une autorité nationale, affirmant qu'il est satisfait aux conditions requises pour déroger au principe d'égalité de traitement entre hommes et femmes aux fins de la protection de la sécurité publique. La disposition de l'article 6 selon laquelle toute personne qui s'estime lésée par une discrimination entre hommes et femmes doit disposer d'un recours juridictionnel effectif peut être invoquée par des particuliers a l'encontre d'un Etat membre qui n'en assurerait pas l'entière application dans son ordre juridique interne . »

Décision n° 96-373 DC du 9 avril 1996 : rattachement du droit à un recours effectif - Article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 en tant que partie intégrante du bloc de constitutionnalité.

  • Le caractère réglementaire de l'acte

CE du 9 févr 2018 n° 404982 

Revêtent un caractère réglementaire les clauses d’un contrat qui ont, par elles-mêmes, pour objet l’organisation ou le fonctionnement d’un service public. S’agissant d’une convention de concession autoroutière, relèvent notamment de cette catégorie les clauses qui définissent l’objet de la concession et les règles de desserte, ainsi que celles qui définissent les conditions d’utilisation des ouvrages et fixent les tarifs des péages applicables sur le réseau concédé. En revanche, les stipulations relatives notamment au régime financier de la concession ou à la réalisation des ouvrages, qu’il s’agisse de leurs caractéristiques, de leur tracé, ou des modalités de cette réalisation, sont dépourvues de caractère réglementaire et revêtent un caractère purement contractuel.

  • Exposé

L’administration dispose pour agir de deux types d’actes juridiques : le contrat qui est un acte plurilatéral, fruit d’un accord entre l’administration et les personnes privées, et l’acte unilatéral.

Ce dernier doit son nom à la façon dont il est élaboré. Le destinataire n’intervient pas dans le processus, l’acte lui sera imposé. C’est en cela que l’acte est qualifié d’unilatéral. Il traduit des prérogatives exorbitantes du droit commun qui caractérisent l’action de l’Etat et de son administration, régime juridique particulier.

 

Pour garantir la prompte et bonne exécution de ses actes administratifs unilatéraux, l’administration dispose du  privilège du préalable, règle fondamentale du droit public. Cette prérogative de puissance publique signifie que la décision a force obligatoire par elle-même, elle s’impose, préalablement à toute intervention du juge, au destinataire de l’acte. La décision bénéficie d’une présomption de conformité au droit. Ce privilège peut être remis en cause par le biais du sursis à exécution demandé par l’administré au juge. Mais il est accordé de manière parcimonieuse et souvent tardive. Soulignons toutefois que l’autorité de la chose décidée n’est pas équivalente à l’autorité de la chose jugée. En effet, la décision administrative peut être remise en cause devant le juge. Le recours par l’administré n’a pas d’effet suspensif puisque l’administration a le privilège du préalable.

Avant d’aborder le contentieux pour excès de pouvoir, il est intéressant de la distinguer du recours de plein contentieux. Distinction introduite au XIX s par Edouard Laferrière.

 

Le premier est un contentieux objectif, les pouvoirs du juge sont limités à l’annulation des actes administratifs illégaux. Le second est un contentieux subjectif, le juge a les pleins pouvoirs, il peut annuler, réformer (substituer sa propre décision à celle de l’administration) et peut condamner à des dommages-intérêts.

 

Soulignons qu’une exception existe à cette distinction. Il s’agit d’assortir les conclusions d’annulation d’une demande d’injonction, art L911-1 et s du CJA « Lorsque sa décision implique nécessairement qu’une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public prenne une mesure d’exécution dans un sens déterminé, la juridiction saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d’un délai d’exécution ». Il y a changement de casquette du juge :

 

-          1° Contentieux de l’annulation : juge de l’annulation

-          2° En tant que juge de l’exécution : prescription à la suite de l’annulation.

 

Le recours pour excès de pouvoir est un recours tendant à l’annulation d’une décision administrative faisant grief. L’adversaire au procès est l’acte administratif. Il doit être exercé dans les deux mois suivant la publication ou la notification de la décision contestée. Exigence d’une décision préalable, art. R 421-1 du CJA  « Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. L’administré doit avoir un intérêt à agir.

 

L'arrêt Dame Lamotte pose le principe selon lequel toute décision administrative peut faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir (CE 17 février 1950). Les cas d’ouverture du recours pour excès de pouvoir correspondent aux irrégularités qui peuvent affecter l’acte administratif et entraîner son annulation. Dans une première partie, il sera question de ces causes. Ensuite nous nous pencherons sur les délais de retrait pour illégalité par l’autorité compétente et de contentieux pour excès de pouvoir.

 

I-                    LES CAUSES D’OUVERTURE DU RECOURS POUR EXCÈS DE POUVOIR

 

Depuis Laferrière, quatre moyens de droit sont retenus. Certains visent l’illégalité externe de l’acte, relative au processus de la prise de décision, d’autres visent une illégalité interne portant sur la décision même.

 

A-      L’illégalité externe de l’acte

 

Il s’agit d’un moyen relatif aux règles de procédure, de forme et l’incompétence.

 

-          L’incompétence

 

Il s’agit d’un moyen d’ordre public  qui peut être soulevé à tout moment de l’instance par le juge ou les parties.

 

« Le défaut de publication de l'arrêté du maire donnant délégation de fonctions à l'un de ses adjoints vicie pour incompétence (moyen d'illégalité externe) l'ensemble des décisions qui prises par ce dernier. Il y a incompétence lorsque l'auteur de l'acte n'avait pas pouvoir légal de prendre cette décision, ce pouvoir étant dans les attributions d'une autre autorité. L'incompétence constitue le vice le plus grave pouvant entacher une décision administrative et elle constitue un moyen d'ordre public que le juge doit en principe soulever d'office ». CE 26/09/2008 n° 294021.

 

-          Vice de procédure ou de forme

 

Le vice de procédure correspond au manquement ou à l’accomplissement irrégulier par l’administration des formalités prévues. Une distinction sera établie entre formalités substantielles et non substantielles Dans ce cas, le juge ne procède à l’annulation de la décision que si le vice de forme ou de procédure revêt une importance telle qu’il a exercé une influence déterminante sur la décision qui a été prise, caractère substantiel.

 

Ainsi, une formalité prévue essentiellement dans l'intérêt de l'administration sera plutôt non substantielle « Considérant que si M. X... soutient que le rapport du fonctionnaire chargé de conduire l'instruction sur l'enquête publique n'a pas été soumis au groupe de travail et au conseil municipal, contrairement aux dispositions du premier alinéa de l'article R. 123-9 du code de l'urbanisme ; que le centre régional de propriété forestière n'a pas été informé de l'élaboration du plan d'occupation des sols, contrairement aux dispositions de l'article R. 130-11 du code de l'urbanisme et qu'aucun plan d'aménagement rural n'a été mis à l'étude, contrairement aux dispositions de l'article L. 121-1 du code de l'urbanisme, ces formalités n'ont pas le caractère de formalités substantielles dont l'omission serait de nature à entraîner l'irrégularité de la procédure d'élaboration du plan d'occupation des sols » CE 27 juillet 1984 Baillou

 

CE 4 février 2011 n° 330562 « qu'il suit de là que la COMMUNE DE SAINT-PRIX est fondée à soutenir que la cour administrative d'appel a entaché son arrêt d'une erreur de fait en écartant le moyen invoqué devant elle tiré de ce que, la commission départementale consultative des gens du voyage n'ayant pas siégé valablement au regard de la règle de quorum fixée à l'article 4 du décret du 25 juin 2001 cité ci-dessus, l'arrêté du 5 novembre 2004 du Préfet du Val d'Oise approuvant le schéma départemental d'accueil et d'habitat des gens du voyage a été entaché d'un vice de procédure ».

 

B-      L’illégalité interne de l’acte : illégalités relatives au contenu même de la décision administrative

 

Le Conseil d’Etat contrôle la légalité interne de la décision administrative. Ce n’est plus la compétence de son auteur ou ses conditions d’édiction qui se trouvent sanctionnées, mais l’objectif poursuivi par l’administration et l’intention de son auteur.

 

-          Détournement de pouvoir : censure en raison du but de la prise de décision

 

Avec l’arrêt Pariset, rendu le 26 novembre 1875, le Conseil d’État va autoriser les juridictions administratives à annuler un acte pour détournement de pouvoir. Le juge se doit d’annuler les décisions prises en fonction d’intérêts personnels ou politiques (CE 16 nov 1900 Maugras – CE 8 juillet 1991 Amato) et non dans l’intérêt général.

 

-          Violation de la loi : censure en raison du motif de la prise de décision

 

Nous pouvons évoquer trois motifs qui ont conduit l’administration à prendre la décision contestée :

 

L’erreur de droit, défaut de base légale : Un arrêt paraît intéressant car le Conseil d’Etat consacre la supériorité du droit dérivé communautaire sur la loi nationale. Il s’agit de la décision du 28 avril 1992 SA Rothmans où la décision de l’administration est annulée « qu'il suit de là que l'article 10 précité du décret du 31 décembre 1976, pris sur le fondement de l'article 6 de la loi du 24 mai 1976, dont il y a lieu d'écarter l'application, est lui-même dépourvu de base légale ; qu'il résulte de ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et du budget n'a pu légalement, en maintenant le prix des tabacs manufacturés à un niveau différent de celui qui avait été déterminé par les sociétés requérantes, rejeter implicitement les demandes de la société Rothmans International France et de la société anonyme Philip Morris France tendant à l'augmentation de 50 centimes du prix des produits importés ou distribués en gros par elles au 1er septembre 1983 ; que, dès lors, lesdites décisions doivent être annulées ».

 

CE du 3 juillet 2009 n° 321634 « Considérant que le maire est tenu d'exercer pleinement sa compétence en matière de délivrance des autorisations d'urbanisme ; qu'il n'en va autrement, réserve faite de l'hypothèse où cette autorité a délégué ce pouvoir à un adjoint dans les conditions prévues par le code général des collectivités territoriales ou de l'application des règles de suppléance, que lorsque le maire se trouve dans le cas prévu à l'article L. 422-7 précité du code de l'urbanisme ; que, toutefois, la circonstance que la commune est le bénéficiaire de l'autorisation d'urbanisme ne saurait à elle seule faire regarder le maire comme intéressé, soit en son nom personnel, soit comme mandataire, à la délivrance de cette autorisation, au sens des dispositions de cet article ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en jugeant que n'était pas de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité de la décision attaquée le moyen tiré de l'incompétence de son auteur, le juge des référés a entaché son ordonnance d'une erreur de droit ; que Mme Inge A et Mme Laurence A sont fondées, pour ce motif, à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée »

 

L’erreur de fait dès l’arrêt CE du 14 janvier 1916 « Camino » : « Considérant que si le Conseil d'Etat ne peut apprécier l'opportunité des mesures qui lui sont déférées par la voie de recours pour excès de pouvoir, il lui appartient, d'une part, de vérifier la matérialité des faits qui ont motivé ces mesures, et, d'autre part, dans le cas où lesdits faits sont établis, de rechercher s'ils pouvaient légalement motiver l'application des sanctions prévues par la disposition précitée »

 

L’erreur de qualification juridique des faits qui remonte à l’arrêt CE « Gomel » du 4 avril 1914 : une demande de permis de construire en bordure de la place Beauvau à Paris est refusée par le préfet de la Seine au motif que la construction en projet porterait atteinte à une perspective monumentale. « Cons. que la place Beauvau ne saurait être regardée dans son ensemble comme formant une perspective monumentale ; qu'ainsi, en refusant par la décision attaquée au requérant l'autorisation de construire ; le préfet de la Seine a fait une fausse application de l'art. 118 de la loi précitée du 13 juill. 1911 ».

 

II-                 LE DÉLAI DE RETRAIT D’UN ACTE ILLEGAL ET LE DÉLAI CONTENTIEUX POUR EXCÈS DE POUVOIR

 

Afin de sécuriser les autorisations d’urbanisme et les constructions existantes, la réforme intervenue avec la loi ENL de 2006, unifie les règles de retrait des autorisations d’urbanisme. Le délai contentieux est maintenu à deux mois selon conditions.

 

A-      Unification du délai de retrait par l’administration des actes illégaux

 

Le retrait des actes administratifs unilatéraux par l’autorité compétente, est rétroactif comme l’annulation contentieuse d’un acte par le juge. L’acte est donc censé n’avoir jamais existé. C’est pourquoi, il est important de différencier les actes non créateurs de droits des actes créateurs de droit.

 

Pour les actes frauduleux, la règle est claire. Un acte obtenu par fraude, dans l’intention délibérée de tromper l’administration, n’est pas créateur de droit. C’est pourquoi il peut être retiré à tout moment, tout comme un acte inexistant (CE, 29 novembre 2002, Assistance publique –Hôpitaux de Marseille). La Cour d’appel Administrative de Marseille du 7 février 2008 décide « qu'eu égard à l'ensemble des éléments sus-évoqués, c'est à tort que les premiers juges ont considéré que Mme PHALIPOU avait obtenu le permis de construire délivré le 27 décembre 2001 après avoir intentionnellement fourni de fausses informations à la commune et que, par suite, le maire de Mirepeisset avait pu légalement en opérer le retrait plus de quatre mois après sa notification par sa décision du 22 août 2002 ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande; que ledit jugement et la décision attaquée, intervenue après expiration du délai de quatre mois suivant la notification du permis de construire délivré le 27 décembre 2001 à Mme X, doivent, dès lors, être annulés ». Passé trois mois, le Maire ne peut plus retirer que les permis de construire obtenus par fraude.

 

L’autorité compétence dispose d’un délai de trois mois pour procéder au retrait des permis illégaux qu’ils soient tacites ou express (art. L 424-5 du code de l’urbanisme). En revanche, les décisions de non-opposition à déclaration préalable ne peuvent plus être retirées (art. L 424‑5 du code de l’urbanisme). Elles peuvent toutefois faire l’objet d’un recours des tiers.

 

B-      Le délai contentieux de deux mois

La requête doit être présentée avant l’expiration du délai de recours sous peine de forclusion (irrecevabilité non régularisable !!!) Les conclusions nouvelles sont irrecevables une fois les délais de recours expirés : CE du 25 mai 1995 SA des papeteries Philippe BERGES.

De même, les moyens nouveaux présents au titre d’une cause qui n’a pas été ouverte pendant le délai de recours contentieux sont irrecevables.

Depuis l'arrêt en section du CE le 20 février 1953, Société Intercopie (confirmé par CE Ass 15 juillet 1954 Société des aciéries et forges de St François) l'expiration du délai contentieux entraîne l'impossibilité d'invoquer des moyens de légalité interne si seuls les moyens de légalité externe ont été invoqués dans la requête initiale. C’est pourquoi, il est judicieux d’ouvrir les deux portes.

Une décision peut être explicite ou implicite, art. R 421-2 CJA « Sauf disposition législative ou réglementaire contraire, le silence gardé pendant plus de deux mois sur une réclamation par l'autorité compétente vaut décision de rejet.

Les intéressés disposent, pour se pourvoir contre cette décision implicite, d'un délai de deux mois à compter du jour de l'expiration de la période mentionnée au premier alinéa. Néanmoins, lorsqu’une décision explicite de rejet intervient dans ce délai de deux mois, elle fait à nouveau courir le délai du pourvoi.

La date du dépôt de la réclamation à l'administration, constatée par tous moyens (huissier, LRAR), doit être établie à l'appui de la requête ».

 

CE Commune d’Aiguines 19 nov 2004 n° 264337 « Considérant, en second lieu, qu'il ressort des pièces des dossiers que les bénéficiaires des permis de construire contestés, M. ZY, M. YX, M. et Mme Y et la SCI BRMS, ont produit de très nombreux témoignages concordants attestant qu'ils avaient procédé, à compter de novembre 2002, s'agissant de M. ZY et de juillet 2003, s'agissant des autres bénéficiaires des permis de construire et pendant une durée d'au moins deux mois, à l'affichage des permis de construire délivrés par le maire d'Aiguines, en bordure du terrain sur lequel devait être édifiée leur construction ; que les documents photographiques versés aux dossiers attestent de la régularité des mentions portées sur les panneaux d'affichage ; que la circonstance, invoquée par l'association requérante, que trois membres de cette association, invités à constater l'effectivité de cet affichage, auraient relevé le 26 octobre 2003, soit à une date postérieure à la période continue de deux mois d'affichage mentionnée à l'article R. 421-39 du code de l'urbanisme, et après avoir longé un chemin avoisinant, l'absence de panneaux d'affichage sur les terrains en cause, ne permet pas de remettre en cause utilement les témoignages produits par les bénéficiaires des permis contestés ; qu'il suit de là que ces bénéficiaires doivent être regardés comme ayant apporté la preuve de la régularité de l'affichage sur le terrain, selon des modalités suffisantes pour faire courir à l'égard des tiers le délai du recours contentieux »

Depuis le 1er octobre 2007, le délai court à compter du premier jour d’une période continue de 2 mois d’affichage sur le terrain de la décision.

En outre, à l’expiration du délai d’un an à compter de la réception de la déclaration d’achèvement des travaux, aucune action en vue de l’annulation de la décision n’est recevable. Désormais, l’affichage doit mentionner l’obligation de notifier tout recours administratif ou contentieux à l’auteur de la décision et à son bénéficiaire.

Illustration : Conseil d'État, 1ère et 4ème chambres réunies, 05 février 2018, 407149

Recours contre le refus de retrait ou d’abrogation d’un acte obtenu par fraude

 

Par une décision du 24 février 2014, le maire de P accorde un permis de construire en vue de la réhabilitation et de l’extension d'un immeuble d'habitation à la société PL.

Par un recours gracieux reçu par la mairie de P le 3 août 2015, la SCI C demande le retrait de ce permis de construire, au motif que la société bénéficiaire l'aurait obtenu après une manœuvre frauduleuse.

A la suite d'une décision implicite de rejet du maire de P, la SCI saisit le tribunal administratif pour la voir annuler au même titre que le permis de construire.

Par un jugement du 23 novembre 2016 du tribunal administratif rejette la demande. Il relève que :

  • Le permis de construire délivré à la société PL le 24 février 2014 avait été affiché, conformément aux dispositions de l'article R. 424-15 du code de l'urbanisme, du 11 avril au 11 juin 2014.
  • Le recours administratif de la SCI C, reçu par le maire de P le 3 août 2015, n'avait pu préserver le délai du recours contentieux contre ce permis.
  • Dès lors, le requérant n'était plus recevable à en demander l'annulation pour excès de pouvoir par une requête enregistrée au greffe du tribunal le 27 octobre 2015.

La SCI Cora se pourvoit en cassation. 

Fondement juridique de la demande :

Aux termes du premier alinéa de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction applicable au litige :

  • " (...) la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ".

Aux termes de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme :

  • " Le délai de recours contentieux à l'encontre d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15 ".

Aux termes du second alinéa de l'article L. 424-5 du même code, dans sa rédaction applicable au litige :

  • " Le permis de construire, d'aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peut être retiré que s'il est illégal et dans le délai de trois mois suivant la date de cette décision. Passé ce délai, le permis ne peut être retiré que sur demande explicite de son bénéficiaire ".

Aux termes de l'article L241-2 du Code des relations entre le public et l'administration : "un acte administratif unilatéral obtenu par fraude peut être à tout moment abrogé ou retiré".

Le conseil d'Etat confirme l'irrecevabilité de la demande en annulation pour excès de pouvoir du permis de construire. En revanche, le recours contre la décision de l'autorité administrative refusant de faire usage de son pouvoir d'abroger ou de retirer un acte administratif obtenu par fraude doit être étudié.

 L’illégalité interne de l’acte :

La SCI soutient que le tribunal administratif a commis une erreur de droit en rejetant les conclusions dirigées contre la décision implicite du maire rejetant sa demande de retrait du permis de construire délivré le 24 février 2014 à la société PL.

Elle opposait l'imprécision du document graphique d'insertion du projet dans l'environnement existant comme constitutive d'une fraude.

Analyse du Conseil d'Etat

Le Conseil d'Etat rappelle qu'un tiers justifiant d'un intérêt à agir est recevable à demander, dans le délai du recours contentieux, l'annulation de la décision par laquelle l'autorité administrative a refusé de faire usage de son pouvoir d'abroger ou de retirer un acte administratif obtenu par fraude, quelle que soit la date à laquelle il l'a saisie d'une demande à cette fin.

Dans un tel cas, il incombe au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens :

  • d'une part, de vérifier la réalité de la fraude alléguée
  • d'autre part, de contrôler que l'appréciation de l'administration sur l'opportunité de procéder ou non à l'abrogation ou au retrait n'est pas entachée d'erreur manifeste, compte tenu notamment de la gravité de la fraude et des atteintes aux divers intérêts publics ou privés en présence susceptibles de résulter soit du maintien de l'acte litigieux soit de son abrogation ou de son retrait.

Il résulte de ce qui précède que la société C n'est fondée à demander l'annulation du jugement attaqué qu'en tant qu'il rejette ses conclusions dirigées contre la décision implicite du maire de P rejetant sa demande de retrait du permis de construire délivré le 24 février 2014 à la société PL.

Pour autant, l'éventuelle imprécision du document graphique en cause ne saurait être regardée comme constitutive d'une fraude. Par suite, les conclusions de la requête de la SCI C, qui doivent être regardées comme tendant à l'annulation de la décision par laquelle le maire de P aurait refusé d'exercer son pouvoir de retirer un permis de construire obtenu par fraude, ne peuvent qu'être rejetées.

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